mardi 21 avril 2009

Le hublot

Je t'ai vu... à travers le hublot
Une chape de verre impossible à briser,
Une berge trop lointaine... comment traverser?
Je t'ai vu... tout contre le hublot
Vouloir de ta main me toucher,
Tel un enfant, sur sa buée, dessiner.
Je t'ai vu... au-delà du hublot
Ce sourire lumineux presque me renverser,
Et ta peau brune et douce... désirer.
DECONNEXION
Je ne t'ai plus vu... triste réalité... à en pleurer.

samedi 18 avril 2009

Les couleurs de ma vi(ll)e

Les chalutiers ont regagné le bercail,
Amarrés et grossièrement somnolents.
D'odeurs ils se délestent les entrailles,
De relents de gasoil et de poiscaille entêtants.

Des haut-le-coeur...

Vulgaires au regard de leur voisine,
La Belle Angèle, qui se pâme, gracieuse,
Insolente et fière de ses armatures fines.
Nue de ses voiles, elle est pourtant paresseuse.

Il est neuf heures...

Le crépuscule aiguise des éclats de voix
Et trouble le brillant des prunelles,
Tandis que le clocher du beffroi,
D'une étole rose, drape sa citadelle.

J'ai mal au coeur...

Entâché de pompons roses bientôt rouillés,
Le cerisier de la place grise s'étire,
Vers de fantomatiques volailles grillées,
Indécent témoin de solitudes gorgées de désirs.

Mon espoir de toi se meurt...

Les devantures des cafés ne sont pas encore embuées
Des souffles des amants impudiques.
Mais contre les murs, des silhouettes esseulées,
Errent déjà, orientées par le même vecteur tragique.

Me rejoindras-tu mon coeur?...

Ma ville bleue est devenue rose
Mais mon âme se meurtrit de bleus,
Tandis que ton souvenir me névrose,
Alors que d'ocre à rouge ta ville se meut.

Si seulement... respirer ton odeur...

Enfin sur mon refuge la porte va se refermer,
Filtrant à mes sens la vision parmée
De la cité en proie au chaos de cette soirée.
Mais de l'Autre aimé, je ne suis guère protégée.

Si tu savais... ma douleur... mon coeur...


Place Jean Jaurès à Concarneau (Finistère)

lundi 13 avril 2009

La roue tourne, Corentin, tu verras...



C'est l'histoire de Corentin dont je vais taire l'âge, volontairement, pour le moment..

Corentin est l'aîné d'une fratrie de trois garçons. Sa vie a basculé en novembre dernier et il n'en a pas perdu une miette, il a tout compris...

Corentin est né un certain premier novembre. Il était très attendu, surtout par sa maman, alors âgée de vingt-sept ans. Sa maman...

... est une jeune femme pleine de vie et de malice. Sa gouaille, aux multiples mimiques, qui a accompagné mes années de lycéenne, est le reflet de sa personnalité épurée, dépourvue de fioritures, de sa spontanéité. Elle fait partie de ces rares personnes exemptes de mauvaises intentions, sur lesquelles la méchanceté ne trouve aucun point d'ancrage. C'est une "Amélie" en quelques sortes, désirant avant tout rendre les autres heureux, les deviner amoureux, s'extasiant des petites notes positives et encourageantes jalonnant leur vie. Elle s'approprie les bonheurs des autres et ne les échangerait pour rien au monde au profit du sien. Au vu du vif engouement de ses réactions (à noter : les verbales au fort accent léonard), nul doute qu'aucune idée vile et intéressée n'a jamais trouvé asile chez elle. C'est un être pur comme il en existe peu. Cette rareté me fait prendre conscience, aujourd'hui encore, de sa valeur inestimable et de la chance que j'ai eu de la rencontrer. Elle se donne sans compter et trouve cela normal. Elle n'a jamais pris soin de protéger d'une carapace son coeur de guimauve, fondant à souhait (ou peut-être devrais-je dire, pour rester dans le Léon, son coeur d'artichaut?)...

La maman de Corentin croit au prince charmant, à l'amour inconditionnel, à l'harmonie des coeurs, quitte à s'effacer un peu trop derrière des volontés et des valeurs qui ne sont pas les siennes. C'est donc une proie facile qui sera vite enlevée par un prince, en effet, mais pas si charmant que ça... Il lui promettra un mariage rempli de cierges ivoires, de roses rouges et de satin blanc. Il l'épousera finalement dans la lueur blafarde d'une salle communale pour pouvoir, dès le lendemain, activer un prêt bancaire. En matière de destrier immaculé, elle rêvait et méritait mieux. Asservie, prise au piège d'une prison dorée, les désillusions iront croissantes. Ses doux rêves ouatés ne résisteront pas à l'abrasive cruauté de son compagnon. Sauf un...

Corentin viendra remplir la blessure béante de l'amour et des meurtrissures. Matériellement, il ne manquera de rien tandis qu'affectivement, il se nourrira d'un amour exclusivement maternel. Il grandira dans la conscience de sa mère constamment rabaissée, puis humiliée et finalement opprimée. Quoique... en a-t'il réellement conscience ou est-ce pour lui d'une banale réalité? C'est justement cette référence que sa mère, mutilée de manipulations perverses, veut lui éviter, ainsi qu'à ses frères. Lorsqu'un jour, ce déjà triste décor familial se pare de menaces de mort, Corentin ne rentrera pas à la maison pour goûter après l'école. Il ne rentrera plus jamais...

Dans un abri d'infortune, il provoque alors sa mère sur son choix et ce changement radical. Mais il observe aussi sa maman panser ses plaies, une à une ; il la sait fragile mais tendue de toutes ses forces vers l'espoir du renouveau. Corentin a changé d'école, il n'a plus de chambre pour lui tout seul, il ne voit plus sa mère sortir son chèquier lorsqu'elle part faire les courses, il ne connait de restos que ceux du coeur et ses nouveaux vêtements lui arrivent sans étiquette... Mais peu importe ! Sa maman s'ouvre à la vie telle une fleur. "Maman, tu es la plus belle du monde, aucune autre à la ronde n'est plus jolie que toi" fredonne la chanson. Corentin rêve déjà d'un nouveau papa parce-que, dans une famille, il faut un papa, se dit-il. Mais aussi parce-qu'il a probablement compris que sa mère, comme toute femme, s'enivre de regards amoureux, se nourrit d'attentions et s'épanouit de tendresse.

Jamais je n'oublierai la gravité de son regard lorsque, du haut de ses cinq ans, Corentin me dit "nous, on n'a pas de chance" et moi de lui répondre, non sans un trémolo dans la voix, "la roue tourne, Corentin, tu verras..."

mardi 7 avril 2009

jeudi 2 avril 2009

Match du 1er avril

Match : l'indélébile souvenir contre la sympathique aventure.
Le premier est ce que tu es pour moi ; la deuxième est ce que je suis pour toi (vraisemblablement...)
Je suis la sympathique aventure.
Tu es l'indélébile souvenir.
L'indélébile souvenir jette une myriade d'étoiles dans les yeux de la sympathique aventure, à grands renforts de "on se reverra", "je viendrai en France en mai", "reviens me voir à Marrakech quand tu veux",... La sympathique aventure est sous le charme et se félicite de cette ouverture inéspérée, se rassérène pleinement en se disant qu'elle n'est pas jetée comme une vulgaire sympathique aventure sans lendemain (qu'elle est pourtant...), au matin d'une nuit d'amour.
1 / 0 pour la sympathique aventure.
Puis la sympathique aventure envoie le premier mail, le premier sms, pour lesquels les réponses pleines de chaleur compensent le peu de mots, égrenables sur les doigts d'une main. Mais la sympathique aventure est aux anges, apaisée sur l'inquiétude qui la taraude (à savoir : n'étais-je qu'une étreinte d'implusion sans lendemain ?). Elle se réjouit de représenter plus qu'une classique et sympathique aventure (qu'elle finira par être pourtant...)
2 / 0 pour la sympathique aventure.
La sympathique aventure est toutefois décontenancée d'être perpétuellement l'initiatrice de chaque message et appel téléphonique. Elle commence à douter de l'envie de l'indélébile souvenir de maintenir ce lien fragile.
2 / 1 pour la sympathique aventure.
La sympathique aventure déséspère... Les échos de ses ardeurs lui parviennent de plus en plus étouffés, voire pas du tout pendant une trop longue période. Même la politesse n'est plus de mise pour le souvenir indélébile qui ne répond même plus aux "où es-tu ?", "tu vas bien au moins?" de mise en cas de silence prolongé. La sympathique aventure commence à se dire qu'elle n'était rien de plus que ça et sombre dans une inquiétante mélancolie.
2 / 2 ex-aequo.
Un certain premier avril, après quatre semaines de silence, le souvenir indélébile ressurgit avec une plaisanterie, sous la forme d'un jeu de mots douteux, par le biais d'un mail d'une ligne. "C'est le premier avril !" justifie-t'il ! Mais la sympathique aventure est totalement déconcertée face à ce poisson d'avril doté d'une nageoire caudale un tantinet perverse.
3 / 2 pour le souvenir indélébile.
Le souvenir indélébile rajoute (en réponse à la question posée... évidemment !) qu'il ne viendra pas en mai, que ce sera plutôt cet été, qu'il a trop de travail,... Mais la sympathique aventure n'est pas dupe ! Il y a probablement une autre sympathique aventure sous roche... Elle est déçue mais reste digne.
4 / 2 pour le souvenir indélébile
La sympathique aventure aspire à lâcher prise face à un souvenir indélébile qui ne semble pas s'apercevoir qu'il en est un. Elle ne l'attendra plus... ni en mai, ni en juillet, ni jamais... Elle se dit qu'elle a perdu suffisamment de temps à se laisser charmer et à s'abreuver de rêves distillés, tels une poussière d'étoiles, par le souvenir indélébile. Elle se dit que le destin les remettra ou pas en présence. Inch'allah... Elle a perdu le match mais a gagné en force. A moins qu'elle ait l'occasion de prendre sa revanche ?...
4 / 3 pour le souvenir indélébile.